L’océan a pris sa couleur d’argent du petit matin et je vole vers le soleil. Loin derrière moi, la côte se dissout dans l’horizon. J’aime ne voir que l’eau sous moi. Le grand fleuve vomit sa boue qui forme un grand nuage sombre s’éclaircissant au fur et à mesure qu’il pénètre l’océan. En volant assez haut, on prend mieux la mesure de ce combat entre le gris et le bleu, entre l’opaque et le limpide, entre le mouvement et l’étendue, entre l’eau de terre et l’eau de mer. En volant assez longuement, on voit bien que l’eau revient à sa source, et que sa source n’est pas dans la montagne, mais au fond de l’océan. On voit bien qu’elle y amène la terre en guise de souvenir de son voyage, et puis qu’elle repart en chercher, encore et toujours. Car toujours l’eau revient à sa source, jamais la terre.
(extrait de la nouvelle « Québec » – non publiée)
© Lisiere et Laura Eliand 2024